Meurtres, tortures, viols, déportations d’enfants et d’adultes… : cette enquête instruit pas à pas, témoignages et preuves écrites à l’appui, les crimes de guerre commis et planifiés par Vladimir Poutine et son régime.
Lorsque les forces russes se retirent du nord de l’Ukraine et de la région de Kiev, un peu plus d’un mois après l’agression du 24 février 2022, le monde découvre avec effroi l’ampleur des massacres et exactions perpétrés notamment contre la population civile. Charniers, tortures, viols, quartiers d’habitations anéantis par l’artillerie et les bombes… : le sombre tableau d’une guerre au cœur de l’Europe. Alors que les combats font toujours rage, les premières enquêtes démarrent pour recueillir les preuves de ces crimes et tenter d’en identifier les auteurs. Dans les territoires libérés par l’armée ukrainienne, la police, les ONG internationales, mais aussi de simples civils se mobilisent pour collecter et sauvegarder tout ce que les occupants ont laissé derrière eux. À Boutcha, mais aussi à Izioum et dans la région de Kharkiv, ces zones du sud-est du pays occupées de longs mois par les forces russes, Ksenia Bolchakova et Manon Loizeau recueillent témoignages et indices pour faire apparaître une part du schéma général qui a donné lieu à ces innombrables violations du droit international. Elles s’entretiennent avec des victimes de torture et de détention arbitraire, mais aussi de déportations d’adultes et d’enfants, organisées par le régime russe.
Terreur et propagande
À Boutcha, les réalisatrices ont d’abord rencontré Alexandre Konovalov, dont le jeune frère a été tué à bout portant, dans la rue, par les soldats russes. Au péril de sa propre vie, il a récupéré de nombreux documents appartenant à des occupants, tués dans leurs chars, parvenant à remonter jusqu’aux unités de l’armée présentes dans sa ville. Dans le téléphone portable de l’un des occupants, il a découvert les cartes militaires de l’invasion et dans ses affaires, une balise GPS. Analysée par l’équipe du film, celle-ci prouve la préméditation de ce que Vladimir Poutine appelle « opération militaire spéciale ». Pas à pas, Ksenia Bolchakova et Manon Loizeau remontent ainsi la chaîne de commandement, montrant que tout l’appareil d’État s’est mis au service d’une guerre criminelle, avec la volonté d’anéantir la nation et l’identité ukrainiennes par la terreur et la propagande. Leur enquête les mène aussi de l’autre côté de la frontière, en Russie, où elles ont pu interviewer un général mis à la retraite pour s’être publiquement opposé à l’invasion. Un jeune déserteur russe et un mercenaire de Wagner recruté en prison témoignent également devant leur caméra. Le documentaire démontre ainsi avec éclat la responsabilité d’un président russe tout-puissant, qui vient de se présenter à sa propre réélection pour un cinquième mandat.